Escapade à Bucarest



J'ai choisi cette image de couverture pour tout de suite donner le ton. Bien que Bucarest paraisse grise (surtout un jour nuageux), j'ai été agréablement surprise par la beauté des lieux!

Donc voilà, le dimanche 25 mars, Kalina et moi avons décidé d'aller à Bucarest parce que

1. L'Opéra nationale présentait le ballet Don Quixote et on voulait voir ça
2. Elle a des amis qui habitent la ville et qui nous ont invitées
3. Je voulais visiter la capitale de mon pays avant de le quitter! Et Bucarest est victime de tellement de préjugés que je voulais me faire ma propre idée au lieu de me fier aux mauvais commentaires entendus.

Aller-retour en une journée encore... Cette fois entièrement en train, parce que la fin de semaine c'est le plus rapide pour aller à Bucarest.

Ici dans les gares... distributeurs de livres au lieu de nourriture

Et des pigeons à l'intérieur


À la gare de Bucarest, Adrian, l'ami de Kalina, nous attendait pour nous faire une visite guidée. D'abord en auto, puis à pied dans la partie piétonne, nous sommes passés devant plusieurs bâtiments iconiques, dont l'hôtel abandonné, des édifices gouvernementaux, et bien sûr le fameux parlement. Tout de suite, ce qui frappe dans Bucarest c'est la grandeur, tout est imposant, les bâtisses, les espaces dégagés. Ce n'est pas décrépi du tout!

Malheureusement, les relents de l'histoire et du climat de suspicion règnent encore, c'est pourquoi il n'a pas été possible d'arrêter près de lieux importants pour prendre des photos, pour des raisons de surveillance et de sécurité. Un exemple, le lieu où l'ambassade d'Israël est installé n'est pas annoncé et est un secret (de polichinelle), et si quelqu'un flâne sur le trottoir devant, il va se faire questionner par des agents de sécurité. Restants de mouvements antisémites de la guerre.

Mais j'ai quand même réussi à prendre des photos pour capturer l'essence de Bucarest!

Adrian était un très bon guide, heureux de faire découvrir sa ville et de nous donner un cours d'histoire, en particulier sur l'architecture, qui est très intéressante. 

Il faut savoir que jusqu'avant la Première Guerre Mondiale, mais particulièrement dans les années 1910, son âge d'or, Bucarest était réputé pour sa beauté. Ses liens avec la France étaient concrétisés dans l'inspiration parisienne de l'architecture et aménagement urbain. On la surnommait  «le petit Paris» ! Aujourd'hui, quelques belles constructions de cette époque ont survécu au temps et sont facilement remarquées, surtout dans le centre piéton.

Sauf que, entre temps, il y a eu 2 guerres et une période communiste, à partir de 1944 jusqu'à 1989, donc beaucoup de vieux édifices ont été détruits, et les fameux bloc appartements communistes (pour loger efficacement tous les gens qui arrivent des villages) sont construits. 2 tremblements de terre dans les années 1970 font encore beaucoup de dommages, et les bloc construits après 1977 le sont beaucoup plus solidement.

Ceausescu avait la folie des grandeurs, d'où tous les énormes édifices gouvernementaux et le plus grand de tous, le Parlement. Il a fait détruit un secteur entier habité pour avoir assez de place pour le construire. Il est situé au bout d'un très large boulevard inspiré des Champs Élisés.

Bucarest est une ville qui a complètement changé d'allure en 100 ans et qui n'est pas encore terminée. Il y a des bâtisses d'avant 1900 entre 2 blocs communistes dont un solidifié, et en face, un style architectural émergent, un édifice très moderne tout en verre avec une façade récupéré d'une vieille construction détruite.

Beaucoup de projets de Ceausescu n'ont jamais été menés à terme, ce qui rend peut-être les moyens pour les entreprendre encore plus désolants. Il n'aura jamais siégé dans son parlement géant mais il était tellement paranoïaque qu'il l'a fait construire de façon à ce qu'il soit suffisamment bien aéré pour ne pas avoir besoin de chauffage ou climatisation (il avait peur d'être empoisonné). Des légendes urbaines racontent aussi qu'il y aurait des passages secrets sous la ville pour permettre de s'évader...

J'ai mis les photos dans un ordre aléatoire pour que vous puissiez apprécier tous les différents styles qui se côtoient.

La bâtisse grise au centre au loin est la partie centrale du Parlement

Zoom dessus

Vieille architecture







Exemple du style émergent

3 styles en 1 photo






Église orthodoxe russe

Bloc communiste

Bloc d'avant le communisme

Bloc communiste


Symétrie du Champ Élisé roumain

Parlement au bout du boulevard




Ruine du château de Vlad Tepes (Dracula) alors qu'il régnait sur la Wallachie à l'époque des invasions ottomanes


À l'Ouest, l'influence parisienne, et à l'Est, l'influence ottomane. Bucarest, un croisement temporel et géographique. Un bon thé turc!



J'ai marché dans les traces de la révolution, le lieu où en décembre 1989 des émeutes (mortelles) se sont tenues face au balcon d'où Ceausescu a donné son dernier discours (hué) avant de s'enfuir du toit en hélicoptère pour être capturé quelques heures plus tard, jugé hâtivement puis exécuté. La nouvelle de sa mort n'a été annoncée que quelques jours plus tard, ce que beaucoup reprochent, puisque pendant ce temps, la confusion a créé d'autres émeutes et morts.
Le chemin pour sortir du communisme a été entamé à ce moment, mais il est long... Nouveau régime politique, mais mêmes visages de l'ancien. À quand un gouvernement sans lien avec le passé...

La place de l'émeute, presque 30 ans plus tard

Monument commémoratif



Soiré à l'Opéra National! Très impressionnant à l'intérieur, quoique la compagnie en tant que telle, qui se remet d'un récent scandale, n'est pas la meilleure que j'ai vue.
Adrian a avancé l'hypothèse que ce scandale, impliquant l'embauche puis la démission forcé d'un Danois comme directeur artistique de la compagnie (une histoire parmi tant d'autres), aurait laissé une appréhension quant à l'embauche d'artistes étrangers au sein de divisions financées par le gouvernement, ce qui aurait pu m'affecter.







Avec Adrian et Veronika, une autre amie qui nous a rejoints plus tard

Pour retourner à la gare de train, un petit passage dans le métro, auquel est aussi associé beaucoup de légendes. Une histoire vraie, une station a été construite en secret, à l'encontre des ordres d'Elena Ceausescu qui ne trouvait pas pertinent d'en avoir une à côté de l'université, a été rendue fonctionnelle après l'assassinat du couple. Lors de la construction d'une autre, un lac souterrain a été découvert, ce qui a créé une inondation et maintenant une section entière du réseau est condamnée.

Mon verdict? J'ai énormément apprécié découvrir des moments cultes de l'histoire de la Roumanie par la visite de Bucarest. Je pense que c'est une ville pleine de potentiel et qui a avantage à conserver les marques des différentes étapes de son histoire, ça lui donne un cachet unique. Bien sûr, je n'y ai passé que quelques heures, accompagnée de locaux qui savaient où aller, mais ça a suffit pour me faire une idée complètement nouvelle. J'avais également lu sur les quartiers défavorisés, dont le district de Ferentari, réputé pour être extrêmement pauvre et peuplé principalement de Roms et drogués dans des logements insalubres entre des rues recouvertes de vidanges. Mais semble-t-il que les documentaires dessus ont aussi exagéré. Bref, la pauvreté et les problèmes sociaux existent à Bucarest, comme dans toutes les métropoles de ce coin du monde, mais ce n'est qu'une facette de la ville, qui se révèle en fait surprenante et fascinante.

Commentaires

  1. Belle façon de fêter Pâques! Une super opportunité pour toi de visiter la capitale. Merci pour ce résumé d'histoire de la Roumanie et ces bonnes photos de Bucarest, malgré les restrictions.

    Tu es maintenant en congé. Ce congé aura une saveur spéciale pour toi. Je ne sais pas tout ce que ça suppose, mais ce sera tout sauf de la routine, j'imagine! C'est encore un mystère pour nous et je te souhaite la meilleure "suite" possible.

    A bientôt

    grand-maman Lisette

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  2. J'ai tout aimé de ton résumé de ta visite.

    Je retiens l'hypothèse d'Adrian sur le scandale, impliquant l'embauche puis la démission forcé d'un Danois qui aurait pu t'affecter. Ça fait du sens de tout ce qui ne faisait pas de sens!
    Est-ce une histoire très récente? Tu sembles dire que oui..

    F PAPA

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    1. Je l'ai lu dans ma revue de danse il y a 2-3 ans... je vais chercher un article

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    2. https://www.romania-insider.com/alina-cojocaru-johan-kobborg-banned-bucharest-national-opera/

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    3. Mais entre temps j'ai eu d'autres hypothèses aussi. Je pourrais faire un article complet dessus

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    4. Alina Cojocaru est Roumaine et on l'a vue danser dans Don Quixote à New York!

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    5. https://www.romania-insider.com/bucharest-national-operas-ballet-company-falls-apart-after-directors-resignation/168706/

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    6. J'ai lu les articles. J'invite les autres lecteurs à en faire autant. C'est certainement une bonne piste pour expliquer tes épreuves avec l'immigration. Cette historienne doit pas être réglée et elle a certainement laissée des cicatrices. Connais-tu la conclusion? Est-ce que Johan Kobborg et Alina Cojocaru sont de retour à l'opéra de Bucarest depuis cette crise? Que font-ils maintenant?

      PAPAPAPAPAP

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